Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

jeudi 29 janvier 2015

Jour 65

LE RÊVE


Nous avons fêté jusqu’au petit matin. Il y a longtemps que je n’avais pas fait une nuit blanche, celle-ci fut magique. Elle a démarré dans la joie, sur cette impulsion de s’autoproclamer une famille pour l’occasion. Les plaisanteries révélaient bien les attirances des uns pour les autres, les plus proches sont devenus des frères et sœurs, les autres des cousins plus ou moins éloignés. On a beaucoup ri, on a bien mangé, et on a dansé. À un moment, quatre jeunes ont trouvé une harmonie spontanée sur une musique jouée par d’autres jeunes qui ont improvisé un air sur des instruments de fortune. Il y avait deux guitares et un saxo, un a attrrapé deux cuillères pour en jouer, puis ce furent des morceaux de bois, des couvercles, etc. Un petit moment de grosse cacophonie, puis un diapason inspiré. Des voix, des bruitages, une mélodie, et la danse. Un moment de parfaite harmonie entre les uns et les autres et une source d’inspiration universelle. Impossible de ne pas y participer, c’était terriblement contagieux.

On avait allumé un feu, à un moment, il m’a semblé que la lumière dansait avec nous. Je voyais des volutes s’échapper des bras des danseurs et des auras autour des chanteurs. Et cela sans alcool ni drogues, nous n’avons strictement rien fumé…

L’ambiance s’est calmée, certains sont allés se coucher, d’autres ont entamé des discussions pendant que des chants très doux s’élevaient encore autour du feu. Je suis à l’écart avec Arnaud, le jour pointe. J’aime ce moment où le soleil promet son arrivée et son énergie est perceptible avant son arrivée. Entre chien et loup, comme on dit, quand le bleu de la nuit se teinte de blanc sur l’horizon, n’arrivant pas encore à éteindre les étoiles. Ça me rappelle la nuit de la mort de mon frère. À mi-voix, je raconte:

— C’était l’été, j’habitais à 100 km de chez lui. Ma belle-sœur m’avait appelée dans la nuit pour me dire qu’il était admis à l’hôpital en urgence pour un cancer terminal. Cancer, nous savions tous, mais «terminal», j’en avais fait le déni. Bouleversée par la réalité soudaine, j’avais hésité à y aller tout de suite. Bien sûr, je n’ai pas réussi à me rendormir, alors au bout d’une heure, j’ai envoyé un message à ma belle-sœur pour lui dire que j’arrivais. Le temps que je me prépare, c’était comme ça, entre chien et loup. J’étais dans cet espace particulier qui appartient aux choses essentielles de la vie: la naissance, la mort, tu sais, ces moments intenses et vrais. La route longeait le lac sur plusieurs dizaines de kilomètres avec une vue sur la riviera, un des plus beaux panoramas au monde. En face, les montagnes se détachaient déjà de la nuit, les étoiles brillaient encore par milliards, c’était pas loin de la pleine lune qui diffusait sa lumière froide sur la surface du lac. Une nuit magnifique et au fond, le jour qui arrivait comme maintenant, annonçant une magnifique journée d’été. C’était fin juillet. J’ai pensé: c’est un bon jour pour mourir. J’avais l’impression de la création saluait son départ. Ou plutôt, son retour dans un autre monde. Tiens, ça me fait penser, hier aurait été son anniversaire. Ça doit être pour cela que je pense à lui.

Arnaud ne dit rien. Nous restons un moment ainsi, à contempler le spectacle quotidien du lever du soleil.

— On est complètement cons de ne pas assister à cela tous les matins, dis-je. C’est magnifique! Bravo, les effets spéciaux, regarde comme le ciel est rouge, là. C’est différent tous les jours, comment peut-on banaliser cela?
— T’es folle, dit Arnaud en riant. J’ai faim.

Nous allons jusqu’à la cuisine nous faire un café et un petit déjeuner.


Lire la suite…







Aucun commentaire: